Apprendre en groupe

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Quelle est la raison qui conduit un enfant ou un adolescent à fréquenter l’école, le collège ou le lycée ? L’opportunité de se faire des amis bien sûr ! Pourvu que cet espace soit sécurisé, c’est-à-dire que l’enfant ou l’adolescent ne subisse ni brimade ni menace. Physique comme psychologique. Sous cette condition, l’apprentissage social augmente la performance des apprenants.

 

 

  1. Les bases neurobiologiques

 

Aujourd’hui, les neuroscientifiques sont unanimes pour reconnaître que nos expériences influencent notre cerveau, qui en retour influe nos expériences. Bref, il existe une interdépendance entre l’environnement et le cerveau. Sous l’effet de la plasticité synaptique, le cerveau se transforme en permanence au contact de l’environnement, notamment des relations sociales. L’enjeu de la neuropédagogie comme de la pédagogie systémique est d’employer ces caractéristiques pour mieux apprendre.

Les relations sociales positives renforcent également le système immunitaire lorsque les relations sociales négatives l’affaiblissent.

Même si les neurones miroir sont impliqués dans l’apprentissage social, les relations sociales doivent être enseignées aux enfants dès leur plus jeune âge. Effectivement, on ne naît pas avec des compétences sociales, on les acquiert : le cortex préfrontal est la zone du cerveau qui arrive le plus tardivement à maturité (après nos vingt ans), or elle est critique pour l’apprentissage social.

Il convient donc d’éduquer les enfants à reconnaître les émotions des autres et à prendre soin d’autrui, tout en rappelant qu’en raison de l’élagage synaptique (la perte de connexions neurales), l’adolescent est moins capable de reconnaître les émotions qu’un enfant.

Les relations sociales augmentent la production « d’hormones du bonheur » comme l’oxytocine, la sérotonine ou les opioïdes. Rappelons que la sérotonine est très impliquée dans l’attention, la mémorisation, et la production de neurones.

 

 

  1. Les effets de l’isolement et de la séparation

 

En revanche, l’isolement, la perte d’un être cher ou la séparation provoquent des maux considérables pour la santé (par exemple, selon Ornish, les adultes isolés connaissent un taux de maladies cardio-vasculaires de 3 à 5 fois plus élevé que les autres) mais augmentent aussi la gravité et la durée de la dépression. Enfants et adolescents sont loin d’être épargnés par ce phénomène, bien au contraire.

La perte, l’isolement ou la séparation engendrent la CRF (Corticotrophin-releasing Factor), une augmentation de l’adrénaline, une diminution de la norépinéphrine, de la sérotonine et de certaines dopamines. L’isolement augmente donc l’agressivité.

Il convient d’éviter de rejeter ou d’isoler un enfant ou un adolescent.

 

 

  1. L’accueil et la sécurité

 

Selon la pyramide de Maslow, le besoin de sécurité arrive au second rang, derrière les besoins physiologiques.

La sécurité doit être physique bien entendu, voilà pourquoi il est important non seulement de présenter l’établissement afin de permettre aux élèves et étudiants de se familiariser avec les lieux, mais aussi d’empêcher que naissent les conflits.

A la sécurité physique doit s’ajouter la sécurité psychologique. Il est important que l’élève ou l’étudiant se sente bien dans son établissement. Les remarques désobligeantes comme les brimades devraient être proscrites. L’estime de soi est un moteur de réussite, une source de motivation. De plus, le cerveau ne fait pas bien la distinction entre un danger réel et un danger fictif. Aussi, face à une brimade, les fonctions supérieures sont-elles dépassées par le comportement fight-or-flee (affronte le danger ou fuis-le), vieil héritage de notre cerveau reptilien. La brimade engendre le stress qui augmente la sécrétion de cortisol, et empêche la mémorisation, le raisonnement.

Il convient de réserver quelques heures en début d’année pour présenter l’établissement mais aussi les différents éléments de la classe. Que chacun apprenne à connaître l’autre. Différentes activités peuvent soutenir cela : de l’interrogation sur les sources d’intérêt de l’individu au jeu de rôle en passant par des petits exposés. Cela renforce la cohésion du groupe, le rend familier à chaque individu et facilite par la suite les apprentissages. Si la formation professionnelle prend en compte ce facteur, la formation initiale l’ignore globalement, cela est laissé à l’initiative des professeurs.

 

 

  1. L’apprentissage coopératif

 

L’apprentissage le plus efficace inciterait les apprenants à s’informer sur le sujet du lendemain, soit à « apprendre » une leçon sur son livre ou via Internet avant de se la voir expliquée en classe. Ce faisant, le temps de classe pourrait être réservé aux objectifs taxonomiques supérieurs.

L’apprentissage coopératif qui repose sur l’organisation au sein de la classe de groupes de 4 personnes maximum offre plusieurs opportunités intéressantes :

  • montrer que chaque apprenant a un filtre par lequel il transforme une information en connaissance ;
  • permettre à certains de mieux comprendre un cours parce qu’il sera expliqué par l’un de ses camarades, avec un vocabulaire différent ;
  • montrer que le groupe a besoin de l’individu, et l’individu du groupe ;
  • montrer la variété des processus d’apprentissage.

Des études menées par Lou (1) et son équipe ont démontré qu’effectivement les groupes de 3 à 4 personnes étaient plus performants que des groupes plus importants. Mais pour les constituer, il faut prendre en compte les remarques suivantes :

  • les élèves faibles vont beaucoup progresser avec les élèves forts ;
  • les élèves moyens progressent le mieux dans des groupes qui ne comprennent que des élèves moyens ;
  • les élèves forts ne progressent que peu dans un groupe homogène constitué uniquement d’élèves forts. Inclure des élèves forts dans des groupes d’élèves faibles ne semble pas constituer un handicap pour les premiers.
  • les garçons préfèrent s’intégrer dans des groupes de même statut indépendamment de la tâche à accomplir ou de la qualité de la camaraderie;
  • les filles préfèrent s’intégrer dans des groupes d’amies ou selon la tâche à accomplir.

Des recherches (2) menées sur l’apprentissage coopératif ont démontré que chaque membre du groupe progressait davantage que les élèves qui ne pratiquaient pas d’apprentissage coopératif.

Environ 20% du temps de la formation devrait être réservé à l’apprentissage coopératif. Le rôle de l’enseignant serait alors de superviser les groupes et de s’assurer que les connaissances se construisent convenablement.

 

 

  1. Le peer-teaching

 

Le peer-teaching, ou enseignement de pair à pair se distingue de l’apprentissage coopératif en ce qu’un élève endosse le rôle du professeur quand dans l’apprentissage coopératif, chacun apprend et enseigne en même temps, sous l’autorité d’un enseignant.

Avec le peer-teaching, les rôles sont bien définis. Un élève enseigne aux autres. On serait tenté de donner ce rôle aux meilleurs élèves, mais les expériences ont démontré que les élèves les plus mauvais peuvent se muer en bons enseignants lorsque l’occasion leur est donnée. Il faut pour cela laisser un temps de préparation à l’élève qui va donner le cours.

Les bénéfices du peer-teaching sont nombreux pour l’élève qui enseigne à ses camarades :

  • meilleure maîtrise de la discipline à enseigner, puisqu’il apprend pour transmettre. En enseignant, apprendre prend un sens ; cela répond à une utilité pratique. Or, lorsqu’on trouve du sens à ce que l’on fait, on est davantage motivé.
  • développement de la confiance en soi.
  • développement du leadership.

Enfin, faut-il rappeler qu’un enfant ou un adolescent fait plus volontiers confiance à un camarade de son âge qu’à un adulte ?

 

Notes

– (1) Lou, Y., Abrami, P., Spence, J., Paulsen, C., Chambers, B., & d’Apollonio, S. : Within-class grouping: A meta-analysis. Review of Educational Research

– (2) Walberg, H.: Productive teaching. New directions for teaching practice and research

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