Le profilage pédagogique en Gestion Mentale

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Cela fait longtemps que je pratique la Gestion Mentale en direction d’un public varié, pourtant le profilage demeure toujours un exercice fort difficile. Il faut à chaque fois se remettre en question et réviser ses théories, être à l’écoute du profilé et traiter de nombreuses données. Il faut également oser répondre « je ne sais pas », « je ne suis pas certain » plutôt que de donner un mauvais diagnostic. Un diagnostic qui sera toujours insuffisant et partiellement erroné. Même les tests psychométriques, comme la mesure du QI, relèvent plus de la divination que de la certitude, malgré leur protocole rigoureux, quasi-scientifique. Effectivement, les tests sont séquentiels, sériels, quand le cerveau fonctionne certes en série mais surtout en parallèle. On ne mesure donc pas l’intelligence, dont la définition n’est d’ailleurs pas claire. D’autre part, le cerveau évolue, apprend et se reconfigure en permanence en fonction des activités que l’on pratique. Le cerveau est plastique. Il n’y a donc pas de mauvais profil, et celui-ci n’est jamais fixe ; il n’est que mouvement, complexité, unicité. Même les vrais jumeaux ont un cerveau unique. Retenons enfin que tout test mesure avant tout la capacité à passer le test.

Mais si chaque personne est effectivement unique et peut progresser, se transformer, chacune s’inscrit dans des modèles comportementaux et cognitifs que l’on peut plus ou moins bien identifier. Cela offre à l’individu l’opportunité de mieux se connaître, donc de mieux maîtriser et piloter son évolution, l’acquisition de nouvelles compétences. D’autre part, le profilage permet de faire prendre conscience de la diversité des stratégies et processus mentaux, donc d’être plus pédagogue, plus ouvert, de mieux communiquer. Enfin, le profilage a pour avantage de réunir les individus dans des groupes, donc de proposer des solutions certes globales, générales et imparfaites, mais qui n’existeraient pas parce qu’elles ne seraient pas économiquement rentables. Malgré ses innombrables défauts, le profilage est utile quand on le prend pour point de départ d’un travail, pas comme finalité.

 

 

A quoi sert le profilage pédagogique ?

 

  • A mieux se connaître, donc à mieux maîtriser ses processus mentaux et piloter son évolution, son développement ;
  • A acquérir plus facilement et plus rapidement de nouvelles compétences parce qu’on sait quel support pédagogique privilégier, quelle méthode choisir ;
  • A combler les lacunes de son profil par un travail adéquat ;
  • A mieux communiquer et être plus ouvert parce qu’on prend conscience de l’unicité de chaque personne ;
  • A créer des groupes de travail efficaces, le teambuilding ;
  • A réunir des caractéristiques communes aux individus en profils-types et proposer des solutions globales et générales qui n’auraient pas pu exister autrement ;
  • A choisir une profession idéalement compatible avec son profil, tout en sachant qu’aucune n’est fermée puisqu’on peut se transformer. Le profilage pédagogique peut donc aider au recrutement de personnel comme à l’orientation professionnelle.

 

 

Les difficultés et les limites du profilage

 

  • Parce qu’ils sont de plus en plus tournés vers l’extérieur (sport, télévision, ordinateur, portable, etc.), les individus pratiquent de moins en moins l’introspection. Ils méconnaissent donc leurs processus mentaux et il n’est pas sûr qu’ils livrent les bonnes réponses aux entretiens de profilage. Par exemple, après avoir lu un texte à haute voix à des candidats, je leur demande ce qui s’est passé dans leur tête. Beaucoup répondent « j’ai vu des images » et on conclurait alors qu’ils sont « visuels ». Pourtant, si on leur demande « avez-vous vu les images après vous être commenté quelque chose ? », certains répondront « oui ». Sont-ils « visuels » ou « auditifs » ? Voici un exemple de l’une des nombreuses difficultés à profiler ; c’est un exercice très technique qui nécessite une parfaite connaissance des théories ainsi qu’une grande pratique.
  • Le praticien peut mal interpréter les réponses parce qu’il cherchera à les rendre compatibles aux modèles dont il dispose. Le risque est donc d’enfermer le candidat dans l’un de ces modèles.
  • Le profilage, y compris par des moyens psychométriques n’est pas une science. La part d’incertitude et d’erreur est importante.
  • L’être humain est trop complexe pour prétendre le saisir par une évaluation. De plus, c’est un être opportuniste ; c’est-à-dire qu’il se transforme et s’adapte.
  • L’entretien pédagogique tel que préconisé par Antoine de la Garanderie, m’apparaît fragile parce qu’il repose sur le seul couple praticien – individu. Je pense qu’il doit être complété par une évaluation externe normalisée (mise en situation, tests et questionnaires) comme cela se fait en psychologie.

 

 

Comment j’établis le profil pédagogique en Gestion Mentale ?

 

Le profil pédagogique ne doit pas s’établir sur la base de la perception, mais de l’évocation. C’est une règle incontournable. Les points suivants sont purement personnels et relèvent de ma vérité d’expérience ; d’autres stratégies sont possibles.

  • Je conduis donc l’entretien pédagogique via les techniques d’entretien d’explicitation codifiés par monsieur Pierre Vermersch (dans son excellent livre, l’entretien d’explicitation) ainsi que les apports des techniques d’entretien en psychothérapie ;
  • J’ai établi un questionnaire-type adapté aux adolescents et aux adultes.
  • Je confronte les candidats à des situations ;
  • Je présente différentes sources perceptives.

 

 

Que peut-on profiler en gestion mentale ?

 

  • La langue pédagogique : déterminer de quelle manière un individu gère ses évocations visuelles, auditives, kinesthésiques, somesthésiques, verbales ou non verbales. Je rappelle qu’on ne peut pas qualifier quelqu’un de « visuel » ou « d’auditif ».
  • L’évocation à la 1ère personne (on se voit dans l’image ; on entend sa propre voix) ou à la 3è personne (on ne se voit pas, on entend la voix d’un autre) ;
  • Les paramètres P1 à P4 (P1 : les scènes, les gestes, les êtres / P 2 : les mots et les automatismes, ce qu’on sait par cœur / P3 : évocation des rapports et des relations logiques / P4 : créativité, imagination) ;
  • Dans quelle mesure on est plutôt opposant (on comprend par différence) que composant (on comprend par similitude);
  • Si on est davantage motivé par la fin (on agit pour un résultat final) ou par les moyens (on agit pour les étapes);
  • Si on est plutôt reproducteur ou transformateur (1);
  • Si on est surtout recordman (on se focalise sur soi pour se dépasser) ou compétiteur (on se focalise sur autrui pour le dépasser);
  • Si on est essentiellement découvreur ou inventeur (1);
  • Si on est davantage applicatif qu’explicatif dans son mode de compréhension (1).

(1) Cela a été défini dans les cours précédents.

 

 

Les autres outils pour profiler

 

Il existe d’autres outils (j’en utilise certains) pour profiler une personne. En voici quelques-uns :

  • Profiler la personnalité via les travaux de Carl Gustav Jung : le MBTI, Keirsey Tempérament, et assimilés. Ce sont des indicateurs sensés définir la personnalité de quelqu’un. Ils sont très utilisés dans les ressources humaines et le management pour le recrutement, le teambuilding et l’orientation professionnelle. Très franchement, cela relève davantage de la pseudo-science.
  • Profiler le style d’apprentissage via les travaux de Witkin (dépendants ou indépendants du champ), de Kagan, Pearson, Keen et Mc Kenney (Impulsifs, réflexifs), de Kolb (divergents, convergents), de Bruner (centration, balayage), de Pask et Scott (Holistes, sérialistes). Ces travaux sont encore utilisés dans le domaine scolaire, mais ont perdu de leur audience.
  • Profiler les intelligences multiples d’après les travaux d’Howard Gardner. Les travaux de monsieur Gardner sont extrêmement intéressants, et même s’ils ont plus de 30 ans, nous n’en sommes qu’à l’aube des applications concrètes. Ils sont utiles à la fois dans le milieu de l’apprentissage (primaire, secondaire, supérieur, professionnel) et pour les ressources humaines et le management. J’utilise abondamment ses théories et j’ai pu mesurer leur efficacité pour le profilage, dans le sens où ils permettent non pas de définir les intelligences multiples, mais de réaliser un historique du candidat. Je ne suis pas certain que cet outil soit pertinent s’il est employé seul.
  • Profiler la manière dont les individus traitent les informations, sur la base des travaux de Mc Lean (cerveau triunique) et de Roger Sperry (asymétrie cérébrale) : le HBDI de Ned Hermann. Cet indicateur, plutôt empirique, est employé en ressources humaines et en management. Même s’il n’est pas dénué d’intérêt, il ne m’apparaît pas suffisamment pertinent au regard des récentes évolutions en neurosciences et en psychologie cognitive. Il vaut mieux recourir à l’école de Luria (voir ci-dessous).
  • Un exemple de profilage holistique (total) basé sur les travaux d’Alexander Luria : le MIP (Modèle d’Intervention Psychopédagogique). Très en vogue au Canada, les continuateurs de Luria (un grand neuropsychologue soviétique) s’imposent dans la détermination des styles d’apprentissage. Les termes de séquentiel/simultané verbal/non verbal sont de leur ressort. J’emploie également ce modèle efficace, mais toujours avec le doute.

Je ne poux pas aborder tous les types de profilage, je le ferai sans doute en détail dans une rubrique appropriée, en donnant une orientation bibliographique. L’essentiel était de montrer que le profil pédagogique en Gestion Mentale s’inscrit parfaitement dans la lignée du profilage et qu’il mériterait un développement plus conséquent.

Je rappelle enfin qu’on ne peut jamais enfermer quelqu’un dans un profil, que le monde de l’être et du possible est toujours plus grand que soi.

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